Le prieuré de la Sainte-Trinité, Beaumont le Roger


Ces ruines imposantes sont celles du Prieuré de la Sainte-Trinité à Beaumont le Roger.
C'est aujourd'hui une promenade publique que les Beaumontais appellent l'abbaye.

C'est Roger de Beaumont qui décida de son implantation dans cet endroit accidenté, en forte pente, où construire n'a pas du être facile.
Qu'importe, Roger voulait son abbaye là. Entre le mont et la Risle, qui coule à quelques mètres à gauche, derrière une rangée de maisons.
Le terrain a du être soutenu par d'énormes murailles, elles même étançonnées par des piliers massifs en pierre de quinze mètres de haut. Ce qu'on voit sur cette photo est le chemin d'accès à l'abbaye elle-même, entre la muraille et les contreforts.

L'inauguration de l'abbaye avait été fixée au début de l'an 1087, la mort de Guillaume le Conquérant, qui devait assister à la cérémonie de la dédicace la fit reculer.

Roger de Beaumont dota richement la collégiale. Les témoins de l'acte furent Robert Courte-Heuse, fils de Guillaume le Conquérant, Robert d'Harcourt, Roger de Thibouville, Thierry de Launay, Ranulphe de Bigars et autres seigneurs de la contrée.

Le nom de Beaumont le Roger était alors célèbre dans toute l'Europe ainsi que celui du Bec Hellouin, tout proche, dont l'abbaye était fréquentée par les plus grands princes qui venaient y étudier les sciences et les lettres.

En 1135, Raoul de Grosley, chanoine de l'abbaye de la Sainte Trinité, donna à la collégiale l'église Saint Pierre de la Huanière. Voici ce qu'il en subsiste :



En 1142, les chanoines de la collégiale furent remplacés par des moines et la Sainte Trinité devint prieuré dépendant de l'Abbaye du Bec. La donation fut approuvée par une bulle du pape Innocent II.
Le prieuré de la sainte Trinité continuait de recevoir des dons, des rentes et des terres. La liste des donations est interminable. Louis IX passa par Beaumont le Roger en 1258 et afferma aux religieux du Prieuré les vignes sises près du château.

L'archevêque, Eudes Rigaux, visitant le Prieuré le 24 avril de cette même année, y trouva cinq moines qui mangeaient de la viande deux fois par semaine. Il leur ordonna de s'en abstenir. Les moine jouissaient alors de deux mille livres de rentes et de provisions en quantité suffisantes pour tenir jusqu'à la récolte suivante.

En 1307, Philippe le Bel accorda aux religieux du Bec et de Beaumont le privilège de relever directement de la couronne, de transporter, d'acheter et de vendre dans tous le royaume des marchandises exemptes de tous droits. Le fief de Beaumont le Roger avait été donné à Robert d'Artois, son cousin, en compensation de la perte de son héritage, au bénéfice exclusif de sa tante Mahaut. Pour ceux que cette affaire intéresse, elle est expliquée en plusieurs volumes dans l'ouvrage de Maurice Druon, "les Rois Maudits".

En 1790, le prieuré souffrit gravement de la révolution. Les moines disparurent. Ce sont des commerçants de Rouen qui apportèrent des pierres provenant du château du président du parlement de Rouen pour le consolider et retirent les moellons qui obturaient les croisées. A cette époque, une source jaillissait encore aux pieds des remparts.

En 1847, la commune jugeant trop coûteux l'entretien des bâtiments, ils furent adjugés à un marchand de matériaux qui démonta l'édifice sans arrières pensées, jetant aux décombres les dépouilles des moines conservées dans les linceuls de cuir tannés et cousus.
De nombreuses maisons de Beaumont comprennent des pierres provenant de cette démolition.
Un membre de l'Institut, M.Lenormand, dès qu'il en fut informé, arrêta la destruction, malheureusement très avancée en rachetant ce qui restait au nom de la Société des Antiquaires.


Cette gravure représente les contreforts du prieuré de la Sainte Trinité au 19ème siècle. Des maisons à pans de bois étaient logées entre les contreforts.

Les vestiges religieux ne manquent pas dans le coin. La plupart sont oubliés et envahis par la nature. Ainsi, à l'orée de la forêt, du côté du Milan, le Prieuré de Grammont, fondé en 1128 par Robert de Meulan, fils aîné de Roger de Beaumont. Il n'en reste aujourd'hui que quelques ruines, que je compte aller prochainement visiter.

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